L'art d'emmerder le monde [Pv Aleksandrova Alaska]

Le chieur et la garce réunis

Ses bottes s'enfoncèrent sur une des flaques d'eau dispersées un peu partout sur les routes goudronnées, la jeune fille baissa les yeux, réprimant un légèrement grimace qui menaça de grimper sur ses lèvres roses. Le froid fouetta sa peau blanche, la faisait frissonner dans cette veste bien trop fine et pas assez épaisse pour la protéger. Elle était partie sur un coup de tête, une nouvelle fois. Alaska poussa un soupire, un doux nuage blanc apparaissant devant ses lèvres, ses doigts se hâtèrent de refermer le sac pendouillant sur une de ses épaules puis elle reprit sa route, en direction du gymnase de son école. De leur école. Car il jouerait aujourd'hui et elle ne le laisserait jamais jouer sans être là, pour veiller sur son équipe. La jeune mannequin glissa une main sur ses cheveux rosés, quelques peu tressés sur les côtés, presque bouclés sur les pointes. Ce n'était pas tant que le fait qu'il soit là qui l'inquiétait, elle ne possédait pas réellement de liens avec le capitaine de l'équipe masculine, si ce n'était que le fait qu'ils refusaient de laisser le moindre détail de côté, elle était et serait présente dans chacun de ses matchs, pour un avis extérieur du terrain et des compétences de ses adversaires. Ils étaient aussi les siens. 

Cette fois-ci, elle avait demandé à ce que l'on la laisse régler ses histoires de déplacements seule, sans demander un minimum d'accompagnement. La belle avait eu quelques petites affaires à régler à Kyoto, le froid ne l'avait pas gêné, elle n'appréciait pas pour autant cette bise presque glaciale lui effleurant les joues. Elles étaient bien trop pâles, sa peau était bien trop claire. Ses chaussures étant déjà usées par ses déplacements ne cessèrent de se trouver un chemin parmi la pluie,  elle n'avait pas encore fini. Son énergie ne paraissait point la laisser et pourtant, dès que ses talons se posèrent sur le sol du gymnase, elle sentit une étrange fatigue prendre le dessus sur sa détermination. Son masque fût feins le temps de quelques secondes, son visage dévoilant une partie de sa mauvaise humeur. La fatigue suffisait à teindre les couleurs de sa vie, cette fois-ci c'était le gris. La mannequin plissa les yeux, ouvrant légèrement sa veste pour se glisser entre les spectateurs.  Son regard se posa rapidement sur les gens aux alentours, elle ne s'installerai dans nul autre endroit que le premier rang. Tout cela ils le savaient déjà, avant même qu'elle ne soit entrée. Alaska avança jusqu'à se trouver une place convenable, ne trouvant personne à ses côtés. Un sourire aurait dû se dessiner sur ses lèvres, bien que minuscule. Toutefois elle était bien trop énervée de ne pas être avec ses filles, bien trop agacée de s'être blessée inutilement. La rosée se pencha légèrement sur le côté pour venir y déposer son sac, croisant du regard en reprenant sa place initiale un jeune homme ayant profité pour s'installer à ses côtés. En temps normal, elle l'aurait ignoré comme tout inconnu qu'il était. Toutefois elle ne le pouvait pas, parce que son visage lui disait vaguement quelque chose.

Il n'était clairement pas un inconnu.
Elle n'aurait pas espéré le revoir un jour dans sa vie.

Alaska tourna ses deux billes bleutées vers le terrain, faisant en sorte de ne point lui adresser la parole. Sa mémoire ne lui jouait pas de tour, elle était persuadée qu'il avait été le fauteur de trouble et savait même où et quand il était venu poser son grain de sel dans son quotidien. La garçon à ses côtés pencha un étrange paquet de biscuits en sa direction, salissant ses cuisses et sa jupe par de nombreuses miettes à l'odeur fortement sucrées. Ses yeux se posant sur son visage, elle le regarda du coin de l’œil, baffant de sa main la sienne pour ôter ses biscuits de sa vue.

- Je ne veux pas de tes biscuits, ni de ta présence.

Sa froideur ne le laisserait sans doute pas de marbre, leur première et récente rencontre lui ayant prouvé qu'il était soit trop fier, sois trop lent pour comprendre ses reproches.

- J'ai cru à une maladresse de ta part la dernière fois, mais en vérité tu manges en salissant tous les gens autour de toi. Tu me dois une chemise.

Elle ne comptait pas le laisser fuir, pas une fois de plus. Pas tant qu'elle n'aurait pas récupéré son bien.