#Where you gonna sleep tonight ? ϟ feat. Ai

and you're singing the songs
thinking this is the life

Techniquement, la nuit, les gens étaient censés dormir. Après une dure journée de travail, tout le monde n'aspirait plus, une fois la fatiguée installée, qu'à son lit et ses couvertures. Ils se glissaient sous les draps avec un soupir de satisfaction et sombraient rapidement dans les bras de Morphée pour un sommeil peuplé de rêves merveilleux ou agitateurs.

D'aussi loin qu'elle s'en souvienne, Takara avait toujours eu du mal à s'endormir. Déjà enfant, il lui arrivait de rester des heures éveillée, même après que sa mère ne l'ait couchée et ne lui ait embrassée le front pour dire bonne nuit. Aujourd'hui encore, et bien que son sommeil soit toutefois plus régulier tout de même, la jeune fille était parfois prise de crise d'insomnie, qui pouvait la tenir éveillée toute la nuit ou presque. Dans ces moments-là, généralement, la demoiselle avait deux solutions pour palier à ce problème. La première consistait généralement à aller tirer Allie de son lit en lui proposant un petit one-on-one à trois heures du matin, chose que sa rivale ne refusait jamais.

L'autre solution consistait à aller se réfugier chez sa meilleure amie et la personne qui la connaissait probablement le mieux ; Ai. La jeune fille vivait seule dans un grand appartement et avait l'habitude de voir débarquer son amie d'enfance à toute heure du jour et de la nuit. La présidente du comité de discipline avait certes une sale réputation, basée principalement sur des rumeurs faussées qui plus est – certes la rousse était un peu violente, mais Takara ne voyait vraiment pas où était le problème avec cela … sans doute parce qu'elle l'était aussi à vrai dire.

D'autant que la Kurokawa se fichait des ces imbécilités, surtout quand on voyait le temps depuis lequel elle et Ai se connaissaient. De plus, elle aussi était victime du bouche-à-oreilles stupides des lycéens et partout à Kaijou on véhiculait des « fille facile à baiser » et des « sale putain » sur son passage. Choses qu'elle supportait tant bien que mal même s'il y avait clairement des jours ou elle faisait mieux que d'autres …

C'est pourquoi, ceci combiné à d'autres choses, Takara se dirigeait actuellement vers l'appartement de sa meilleure amie, se fichant bien qu'il était plus de onze heures du soir, qu'elle n'avait pas prévenue la concernée et que, cerise sur le gâteau, il pleuvait. Rien à foutre. Elle avait besoin de Ai, là, tout de suite maintenant. Les deux amies d'enfance n'étaient peut-être pas dans le même lycée et ne passaient pas leur temps collées l'une à l'autre H24, mais cela n'enlevait rien à la profondeur et la puissance du lien qui les reliait toutes deux.

Takara enfonça sa tête aussi profondément que possible dans son col pour tenter de se protéger un peu, se maudissant au passage d'avoir oublié de prendre un manteau ou au moins un sweet-shirt avec une capuche. Elle était trempée maintenant à cause de la pluie, fine mais drue, qui s'abattait sur la ville endormie. Elle parvint bientôt en vue de l’immeuble de Ai et composa le code à l'entrée du bâtiment, le connaissant par cœur à force de débarquer ici à toutes heures du jour et de la nuit.

La jeune fille grimpa rapidement les marches, se secouant comme un chien pour se débarrasser un peu des gouttes qui pendaient à ses mèches de cheveux et le bout de son nez, et se planta devant la porte désirée, toquant sans hésiter. La rousse allait sûrement grogner si elle la tirait de son sommeil, mais Takara savait qu'avec elle, nul risque de se voir jeter dehors. Finalement, la porte s'ouvrit et la capitaine de Kaijou senti un sourire étirer ses lèvres malgré ses pensées qui lui obscurcissait l'esprit.

« Salut … Désolé, il est tard je sais. Je peux entrer ? »

Elle laissa glisser son regard sur la silhouette de la jeune fille, se doutant un peu qu'elle l'avait tiré de son sommeil. Mais les colères et les ronchonnements de Ai ne l'effrayaient guère cependant, car la Kurokawa connaissait trop bien son amie et était probablement l'une des rares personnes à ne jamais craindre son courroux.