#Do something ! But I don't know what ! ϟ feat. Akemi&Kosuke

Tokyo, fin de semaine. Akemi sortait tout juste de la bibliothèque adjacente à son lycée, ayant tout juste fini de réviser un peu. Elle en avait profité pour rendre, avec toute la politesse du monde – comme d’habitude, avec elle – les ouvrages qu’elle avait empruntés la semaine passée. Du théorème de mathématique un peu complexe aux thèses étranges en passât par les derniers shojo sortis, elle avait ramené un véritable florilège à la dame de l’accueil, qui la regardait toujours avec cet air mi- compatissant mi- étonné. Comment une jeune fille de son âge pouvait-elle s’intéresser à des choses comme ça ? Elle n’avait donc rien de mieux à faire ? Quelle soit fan de manga passait encore largement, mais sérieusement, les explications scientifiques au sujet du sourire, pourquoi ? Masi bon, elle était agréable, comme gamine, alors elle ne pouvait rien lui dire.

De plus, Akemi lui aurait sans doute répondu, avec son habituel sourire –trop – candide, qu’elle aimait lire, peu importait le sujet des pages dévorées. Douce petite, gentille gamine. Enfin, elle n’était encore jamais tombée sur un hentai ou un livre de pervers et heureusement pour elle ; il ne faudrait pas que ce diamant d’innocence sombre dans les bas fonds de la luxure aussi vite ! Avant toute chose, elle devait apprendre à vivre, tout simplement. Ce fait abstrait pour beaucoup, car acquis de naissance, était un véritable défi, pour elle. Mais elle voulait le relever, coute que coute. Elle voulait prouver aux médecins et, par extension à sa famille également, qu’elle en était capable. Ces années passées en chambre stérile lui avaient au moins enseigné une chose ; elle ne voulait pas y retourner. Jamais.

Alors elle s’efforçait d’avancer. Malgré la douleur que pouvait lui envoyer son corps, malgré les remarques qu’elle entendait souvent sur son passage – sans pour autant les comprendre -, malgré tout un tas d’autres facteurs, elle ne poursuivait qu’un seul objectif ; réussir à devenir « normale ». Tandis que certains voyait loin, en imaginant leur avenir au sein d’une grande société ou en train de faire le tour du monde par simple envie, l’enfant dont il et ici question, perdue entre deux âges, ne se focalisait que sur sa survie. Pour profiter des merveilles qu’elle pensait trouver en marchant elle-même, sur sa propre voie. Restée en cage davantage l’aurait très probablement tué. En dépit de la candeur qu’Akemi laissait entrevoir par chacune de ses actions, gestes ou même parole, elle restait lucide.

Sans doute même beaucoup trop pour son propre bien.

Les médecins ne cessait de lui répéter que ses chances de survie, à cause de sa maladie, n’était que de quinze petit pourcents. C’était minuscule, comme pronostic. Et pourtant, elle et sa famille s’y accrochait tant qu’ils le pouvaient. Abandonner ? Et puis quoi, encore ?! La vie de la plus jeune des Aoki était en jeu. Personne ne voulait abandonner. Personne n’y avait même songé. Ils se battraient tous ensemble. D’autant que désormais, Akemi n’était plus seule, au dehors. Le monde restait bien évidemment bien plus dangereux, mais elle avait pu rencontrer – ou retrouver, c’était déjà arrivé – des personnes dont elle s’était faite l’amie. Kosuke, Takara, Kise-kun, Takao Asuka et Kazunari… Elle savait qu’elle pouvait compter sur eux. Au moins, ces derniers l’aimaient vraiment, chacun d’une façon bien distincte. Ils étaient différents de ceux et celles qu’elle pouvait croiser en permanence au lycée, qui s’approchait d’elle uniquement pour s’en moquer ou pour profiter. Ca, la petite malade ne le voyait pas encore parfaitement. Il faudrait bien qu’on lui ouvre les yeux, un jour, pourtant.

En pleine réflexion doucereuse, l’Aoki sentit son portable vibrer dans sa poche. Ah, quand on parle du loup ! C’était justement Takara-chan qui lui envoyait un message ! Oh ? Ca alors ? Elle était à Tokyo, elle aussi ?! Quel dommage qu’Akemi ne l’eut pas su avant, elle aurait bien aimé revoir la demoiselle de Kaijo ! Ca faisait longtemps qu’elles n’avaient pas pu passer du temps toutes les deux. C’était le genre d’amitié qu’Akemi adorait. Exactement comme dans ses shojos, elle ne se souvenait plus vraiment de comment elle était devenue très bonne amie avec la Kurokawa mais au fond, ça importait peu.

Avec un sourire – quoi qu’il lui faille protéger un peu son nez des gaz d’échappement en grand nombre à cause de la circulation de la capitale tokyoïte-, la petite demoiselle tout frêle renvoya un message à sa camarade féminine pour tenter de savoir quand est-ce qu’elle pourrait la voir prochainement. Maintenant, elle en était très impatiente ! Passant près d’un terrain de tennis, ses cheveux arrangés de telle sorte que l’on aurait dit un fouet enroulé sur lui-même, Akemi avançait, toujours prudemment, un rictus de joie étirant ses lèvres.

Et les cieux parurent lui sourire à leur tour puisqu’au départ d’un terrain d’entrainement au street basket, la coach vit se profiler une silhouette connue. Il lui fallut mettre ses lunettes rondes et globuleuses sur le bout de son nez pour confirmer ce qu’elle pensait alors. Sa tête se mit un peu à lui tourner, mais elle n’en eut que faire, trop pressé de rejoindre la brune. En plus, elle reconnut la personne qui se trouvait avec cette dernière, alors. Kosuke ! Quelle bonne surprise ! Nouveau sourire candide. Elle les rejoignit, heureuse comme jamais !

« Ko-chan ! Takara-chan ! Je sais si contente e vous voir ! »

Elle se demandait s’ils allaient jouer au street basket. Elle aurait bien aimé les observer !

   

Akemi s’était très souvent demandé à quoi ça ressemblait, le bonheur. Quelle texture cela pouvait-il avoir, dans le sens figuré du terme – elle n’était point niaise à ce point-là non plus. Quelle saveur, aussi. Car si l’Aoki connaissait une certaine forme de joie auprès de ses proches, elle savait que quelque chose d’autre existait à l’extérieur, au dehors ; et qu’elle devrait le trouver par ses propres moyens. En la présence de Kosuke mais surtout de Takara, il lui semblait que cette chose informe prenait tout son sens. Son sourire ne devint que plus grand alors qu’elle était maintenant toute proche de ses deux amis.

« Je suis tellement heureuse de vous voir ! »

Il est vrai qu’elle n’aurait su exprimer sa joie autrement. D’un côté, il y avait son ami le blond ; un peu trop vif de temps en temps mais avec un bon fond et de l’autre, son héroïne des temps moderne, lionne de Kaijo. Akemi admirait tellement l’autre jeune femme qu’elle rêvait de lui ressembler autant que possible. Elle ne savait trop comment s’y prendre pour ce faire mais c’était dans ses projets de monter à bien un plan foireux tel que celui-ci. Ce n’était pas vraiment de sa faute, elle vivait encore avec beaucoup d’illusion de petite fille et de candeur trop étouffante. La vie, elle ne l’expérimentait pas depuis suffisamment longtemps pour que cela ait un réel impact sur sa façon de voir le monde. Si on l’écoutait parler, on croirait vivre à Poneyland, presque. C’est dire. Mais passons.

Elle était tout simplement ravie de les retrouver par hasard, comme ça. S’ils se mettaient à jouer, elle se ferait une joie de les regarder faire et de s’inspirer de leurs mouvements pour, peut-être, bonifier l’entrainement des filles de Shutoku. Après tout, on comptait largement sur elle pour la création des menus d’entrainement et tout ce qui s’en suivait. Un vrai travail de coach, en somme ! Rien ne saurait lui faire plus plaisir, pour dire vrai. En dépit de la masse de travail que cela lui occasionnait, la minuscule Aoki se sentait tout de même utile et nécessaire. Cela la motivait à toujours donner le meilleur d’elle-même dans ce genre de cas. C’était tellement différent de l’hôpital ou elle avait grandi qu’elle ne souhaitait rien laisser au hasard ou à la négligence. Elle remplirait le rôle qui lui incombait, point final. Telle était sa ligne de pensée et de conduite.

L’une de ses petites mains vint prendre place sur sa poitrine alors qu’elle soufflait avec un peu plus de difficulté. Akemi fit de son mieux pour prendre sur elle, persuadé que ce n’était rien du tout. Rehaussant ses lourdes lunettes sur le sommet de son nez, elle ignora les appels que lui lançait son corps tout entier et entreprit de questionner les deux sportifs.

« Vous allez jouer ? Je peux vous regarder et vous encourager ?! »

On aurait pu croire qu’elle implosait presque de joie. Et en effet, il n’y aurait pu y avoir de meilleure comparaison que celle-ci. Car il en fallait bien peu pour satisfaire Akemi. La demoiselle n’était pas exigeante, se contentait de peu et ne faisait pas de vagues, en aucun cas. Oui, une parfaite petite héroïne de shojo, naïve et trop pâle pour ce monde en constante évolution. Le problème du ‘mange ou fais-toi mangé’ ne lui avait même jamais effleuré l’esprit. Encastrée qu’elle était dans sa symphonie illusoire, pour le moment elle ne voyait le monde qu’en bichromie, avec un filtre parfait et qui n’avait aucune crédibilité ailleurs.
Une soudaine prise de conscience la prit au corps.

« Ah, excusez-moi, je dois envoyer un message à mon frère pour ne pas qu’il s’inquiète. »

Akemi n’aimait pas se sentir constamment surveillée ou ‘fliquée’ comme on le disait, parfois. Seulement, face à Mahiro ou Yusei, elle ne savait rien dire de négatif ou s’opposer outre mesure à leurs volontés absolues. Alors, même si cela la faisait un peu grincer des dents – bien qu’elle n’en montre rien – elle obéissait, brave petite poupée ballotée par les vagues de la vie qu’elle était alors.

Seulement, alors qu’elle allait terminer sa phrase pixellisé, son cœur lui fait subitement très mal. Elle ne comprend pas ce qui lui arrive et avant même qu’elle ne comprenne ce qui se passe autour d’elle, la voici qui se sent tomber et puis… plus rien. Il n’y a plus que le noir. Elle vient de perdre conscience.