Ne m'en veux pas... [ Pv Akemi ]

Vous dire que j'avais le cœur en miette ? Ça aurait presque pu l'être.
Si j'étais heureux & fier comme un coq de sortir avec Shin-chan ; même si personne ne le savait ; si tout se passait bien chez moi & si nos entrainements étaient clean, je n'étais quand même pas, au fond, des plus à l'aise. Il y a de cela un mois, mon amie, Akemi, m'avait avoué ses sentiments. Sentiments envers qui je n'avais pas pu répondre. Et depuis ce jour, je ne l'avais plus revue.

Elle avait carrément changé d'école. Si certains disaient qu'elle avait changé parce qu'elle était persécuté, d'autre savait qu'un mec lui avait foutu un râteau, sans pour autant mettre ça sur ma pomme. Elle qui était mon amie, avec qui je pensais pouvoir tout partager, ce fut un choc & aujourd'hui encore, c'est ma seule ombre au tableau. J'avais du mal à réaliser que c'était de ma faute. Pas de réponse à mes sms, mes appels & aucun moyen de savoir dans qu'elle école elle était allée.

J'avais fini par l'apprendre ce jour même, alors que je finissais les cours à 12h00. Rakuzan ? NON SÉRIEUSEMENT, RAKUZAN ? Je m'en mordais la lèvre, mais si je voulais avoir des réponses, je n'avais pas le choix. J'avais donc ramené Shin-chan chez lui, avant de lui expliquer ce que j'avais à faire. Il m'avait répondu un bon : "C'est tes affaires, pas les miennes" ; mais j'avais cru voir dans son regard une pointe d'appréhension. BON OK, c'était peut-être plutôt un regard désespéré sur mon cas, mais j'aimais imaginer mon Shin-chan un peu jaloux ou inquiet. Bref.

Fin des cours. J'avais garé mon vélo devant l'entrée du lycée Rakuzan. Je ne pensais pas qu'il y aurait une autre entrée, donc j'attendais là, patiemment. Je finirais bien par la voir après tout. Sinon, et bien tant pis, je trouverais un moyen de revenir.

Dans la foule, j'avais alors vu les joueurs de l'équipe passer pas trop loin de moi. J'avais un vague souvenir de leur tête, mais peu importait, je n'étais pas là pour eux après tout. Et puis, je la vis, à ce moment là.

« Akemi-chan !!! »

Je m'étais alors présenté devant elle. Ok, c'était brutal, mais je ne voulais pas non plus qu'elle m'évite. J'étais à la fois mal à l'aise & terriblement content de la retrouver.

« Akemi s'il-te-plait, accorde moi quelques minutes, tu veux bien ? »

Dans la vie d’Akemi Aoki, plusieurs choses intenses s’étaient déroulées ‘récemment’. Premièrement, elle avait essuyé une peine de cœur tellement intense qu’elle s’était sentie rongée par la déprime des jours entiers, laissant sa maladie, involontairement, reprendre le dessus sur elle. Et puis il y avait eu cette agression qui l’avait clouée dans un lit d’hôpital pendant une semaine, le temps que son corps fragile et imparfait se remette des coups et diverses contusions – les plus graves la faisaient encore un peu souffrir parfois, même si c’était bientôt la fin de ce calvaire, elle le savait bien.

Et puis, il y avait eu ce changement d’école, qui découlait directement des deux événements cités plus avant. Akemi ne voulait plus retourner à Shutokû, même en simple visite de courtoisie. Pas pour l’instant, tout du moins. La demoiselle ne se sentait pas encore prête à faire face à Takao, à qui elle s’était déclarée. Elle avait ressentie la honte logique du rejet des suites de son entrevue avec son ‘grand ami’ sur le toit de son ex-établissement scolaire et depuis, elle ne savait comment réagir.

Elle n’osait répondre à ses appels ou ses mails. Le problème était trop compliqué pour elle et elle n’osait pas demander conseils à qui que ce soit pour le moment à ce sujet. Elle se sentait stupide et immature. Elle savait qu’elle avait fui, qu’elle n’avait fait que retardé le problème et qu’un jour ou l’autre elle devrait l’affronter mais le plus tard ce serait et le mieux elle se porterait. Ainsi en avait-elle décidé de prendre sur elle et d’arborer une facette totalement inédite de sa propre personne, rangeant aux débarras ses illusions de fillettes et ses rêves qui allaient avec. Oh, certes, quelques filaments quelque peu shojo persistaient à être là mais… ils n’étaient plus du tout aussi nombreux qu’auparavant, c’était un fait.

Ce jour-là, alors qu’elle sortait du lycée, la demoiselle fit prise d’un sursaut en entendant son nom être prononcé par cette voix qu’elle connaissait si bien. Pire encore, lorsque Takao se présenta devant elle, ses yeux à elle partirent se planter sur le bitume. Même si elle ne le considérait pas comme un ennemi – il ne fallait pas exagérer non plus -, il était bien la dernière personne qu’elle avait envie de voir aujourd’hui. Et pourtant, l’heure de la confrontation paraissait être enfin arrivée. Elle soupira.

« Takao… »

Puis, tâchant de ne pas se délester de sa carapace neuve, si ‘différente’ de l’ancienne Akemi qu’elle était encore il n’y a pas si longtemps, regarda sa montre d’une bien élégante manière et parvint à planté son regard dans celui du joueur de basketball.

« Tu as cinq minutes. Mon chauffeur m’attend. »

Je suis désolée, aurait-elle voulu ajouter, mais ce fut bien trop lui demander pour cette fois.

Dire qu'elle était contente ? Non, clairement pas. Si cela me brisait le coeur ? Oui, mais ne l'avais-je pas mérité au fond ? Je ne le savais pas trop. Enfin, elle était là, en face de moi et...euh...ok, elle m’accordait 5 minutes. Restant planté là devant elle, le regard un peu éberlué de ce qu'elle venait de me dire, je pris sur moi. Après tout, elle avait pu changer un peu, depuis qu'elle avait quitté Shutoku, pour se renforcer et c'était bien quelque part.

« Akemi, tout d'abord je suis désolé. J'ai été bête de ne pas comprendre de suite ou tu voulais en venir. Je t'ai blessé et ce n'était pas mon intention première. »

Je regardais alors les gens qui passaient à coté de nous, sortant des cours également. Pour le coup, je leur aurais bien dit d'aller se faire voir, mais je devais bien prouver aussi à Akemi que pour moi, le plus important à l'heure actuelle, c'était elle.

« Je trouve toujours les mots dans ma tête et je n'arrive pas à les poser maintenant que je suis en face de toi, mais tu comptes beaucoup pour moi, jamais je ne t'aurais fais du mal volontairement. Je pensais justement t'avouer...enfin...Je...je ne sais que dire d'autre, si ce n'est que je suis désolé. En aucun cas tu as été ridicule, c'est moi qui l'ait été. Je me suis retrouvé bête devant ton départ et si j'avais compris plutôt la situation... »

Je bloquais, je ne savais pas quoi dire d'autre.

« Complètement paniqué j'en ai parlé à ma mère et je me suis fait engueuler ! Je n'ai pas pu lui dire pourquoi on en était arrivé là...mais je l'avais mérité ce savon. Même ma petite sœur en écoutant au porte s'y est mise. » Je faisais une bouche de canard en disant ça, elle m'avait quand même dessiné sans cœur sur sa feuille... « Akemi je suis désolé ! Sincèrement, tu es mon amie, je tiens tellement à toi!»

J'avais même fini par me mettre à terre et m'incliner devant elle. Tant pis pour les autres, on m'avait éduqué ainsi, la politesse passait avant tout, c'était les fondements de notre société et les mœurs de ma famille.

« Si tu veux que je parte, je le ferais, mais jamais je ne te laisserais si tu as besoin de moi...je veux juste que tu le sache. »

Elle aussi aurait bien voulu parlé, en placer une, ne serait-ce que pour dissiper un éventuel malentendu trop vite grossit mais elle n’en eut pas le temps. La jeune Aoki écouta alors avec une attention forcée le discours tenu par Takao. De ses yeux de nymphe injuriée en son âme et conscience, Akemi offrit un regard remplit à ras bord de peine, d’excuses muettes et de mal être à Kazunari. Vraiment, elle se sentait mal à l’aise. Les gens de son école la regardait de travers et si, autrefois, elle aurait fait fit de ce genre d’yeux furtifs et voyeurs – puisqu’elle n’avait alors même pas conscience de leur existence – aujourd’hui était bien différent. Elle ne voulait plus être la risée de tous, la petite ingénue trop innocente pour son propre bien. Elle était une Aoki, elle avait une image à préserver. Elle le comprenait aujourd’hui plus que jamais.

Et présentement, Takao était peut-être bien élevé – elle ne pouvait nier qu’elle lui reconnaissait une politesse bienvenue – mais il ne l’aidait en rien à tenir sa ligne de conduite neuve et cela l’agaçait. Oh ça oui, douce colère, douce irritation de l’esprit. Elle n’avait appris à le ressentir qu’après son agression par cette fille de Kirisaki Dai Ichi. Et si elle avait eu un peu de mal encore aujourd’hui à maitriser cette nouvelle part éveillée en elle, pareille à un Phoenix ne tolérant aucune bride, elle savait néanmoins que l’exprimer dans un endroit public n’était pas la chose à faire. Surtout ici, au Japon. Il y avait des règles pour tout, ici. Et elle se devait de les respecter, point barre.

C’est ainsi que, s’accroupissant une seconde pour se mettre au même niveau que son ex-camarade de classe, Akemi lui prit le bras puis se redressa pour l’entrainer avec elle. Par la suite, ce fut au tour du poignet du brun d’être prisonnier des phalanges malades de la plus jeunes de la fratrie Aoki. Elle l’entraina jusqu’à la voiture qui l’attendait un peu plus loin et l’enjoigna à monter dedans également. Le chauffeur de la splendide berline noire brillante haussa promptement les sourcils devant cette invitation inattendue mais, finalement, se ravisa.

« Hirohito-san, nous allons faire un détour pour ramener ce garçon chez lui. »

Il hocha la tête et remonta la vitre qui séparait le côté conducteur du côté passager arrière du véhicule. Ainsi, Akemi était parfaitement tranquille pour discuter avec Takao. Elle ne le désirait pas et était mal à l’aise rien que d’être prêt de lui – il suffisait de voir comme elle se tenait le plus près possible de la fenêtre de son côté en regardant les paysage défiler par cette vitre teintée – mais les choses étaient ainsi, désormais.

« Takao-kun, c’est très gentil de ta part d’être venu me trouver mais tu n’avais pas besoin de perdre ton temps avec moi. »

Elle prit une inspiration.

« Et surtout il n’était en rien utile de coller ton front à ce maudit bitume. »

Car oui, ça ne l’avançait à rien, personnellement.

Si j'étais gêné ? Pas le moins du monde, ce que je n'avais cependant pas calculé c'est que ça la gênerait elle. Décidément, je n'étais pas doué du tout...C'est là qu'elle m'empoigna le bras et m'emmena je ne sais ou, la suivant docilement, loin des autres je suppose. Et c'est là que nous nous retrouvions devant cette voiture, m'invitant à monter. Elle indiqua, une fois à l'intérieur, au chauffeur de démarrer. Chose faite, le moteur démarrant, ma pensée fut : mon vélo ! Tant pis, ce n'était pas le moment de toute manière. Akemi était à des kilomètres de moi, comme si j'avais la peste & ses paroles n'étaient guère mieux,

« Takao-kun, c’est très gentil de ta part d’être venu me trouver mais tu n’avais pas besoin de perdre ton temps avec moi. Et surtout il n’était en rien utile de coller ton front à ce maudit bitume. »

Le silence. Je mourrais t'envie de soupirer, de gêne, mais je ne le pouvais pas, alors cela me prenait le ventre, comme une crampe, avant de me pincer les lèvres, de regarder mes jambes, puis de me reprendre & d'entamer la conversation.

« Désolé. Mais on m'a éduqué comme ça. » Si elle voulait être froide, j'allais aussi garder mes distances dans mes paroles pour le moment. « Et je ne vois pas en quoi je perds mon temps. Si je ne tenais pas à toi, je ne serais pas venu. Si tenir à quelqu'un c'est perdre son temps, alors autant que l'Homme n'ait jamais de relation sociale. »

Je cherchais alors son regard, déterminé, avant de me détendre. Je n'avais aucune raison d'être froid, de plus, ça ne m'allait tellement pas. Je préférais mourir avec des rides de joie sur le visage, plutôt que de colère.

« Je ne voulais pas te faire du mal Akemi. Et je n'ai d'ailleurs pas du tout compris la raison de ton départ si brusque. Il n'y a pas de honte à déclarer sa flamme, c'est humain et tu es mon amie, je comprenais. Je ne t'aurais jamais jeté la pierre pour ça. » Comment lui dire... « Ce que j'avais à te dire ce jour-là, c'était un secret tout aussi lourd que le tiens. Parce que je te faisais et te fais toujours confiance. Je te comprends tu sais. Je suis voué à vivre un peu dans l'ombre avec ce qui me pèse sur le cœur. Quoi qu'il en soit, je voulais tout de même m'excuser, car je n'ai pas été un parfait gentleman. J'aurais du te courir après ce jour-là. T'arrêter, te prendre dans mes bras et te dire que tout irait bien, que ça ne changerait rien entre nous, que je t'aimerais toujours autant que la Akemi que je connais. Pouvoir tout se dire sans distinction. »

Je soupirais très légèrement, pour me détendre un poil, avant de finir par faire de même, regarder par la fenêtre, en direction de mon domicile, même si je demanderais surement au chauffeur de m'arrêter avant l'arrivée.

« Je suis quand même content que tu ais pu trouver un équilibre. Rakuzan est une bonne école, elle est à ton niveau. Leur équipe est bien aussi, je sais que tu t'épanouiras pleinement. »

La main sur ma cuisse tremblait. Fichu sentiment.

« J'espère que tu me pardonneras un jour, Akemi-chan... »

Ses paroles avaient sans doute été mal interprétées. Tout du moins, le ton employé n’avait en rien aider à la compréhension des deux jeunes personnes présentes ici, à l’arrière de cette voiture de famille fortunée. Cependant, il apparaissait que certains paramètres, encore floués, n’avaient pas été pris en compte par le jeune homme lors de son plaidoyer – qui, il fallait bien l’avouer, résonnait d’éloquence. Sans doute n’était-il tout simplement pas au courant de tout et Akemi, après un soupir, se décida à se détendre quelque peu. Avec Kazunari, elle n’avait pas besoin d’afficher constamment un visage sévère, sérieux et si peu envahit par la joie. Elle n’avait pas besoin de devenir une autre personne, quand bien même son passage à Rakuzan avait simplement contribué à la renforcer en matière de mental.

Jetant un coup d’œil en direction du chauffeur, la petite Aoki s’assura que la trappe qui reliait les deux parties du véhicule était bien fermée avant de reprendre la parole. Il aurait été regrettable que ses parents, Mahiro ou encore Yusei apprennent qu’elle ait trop ‘parlé’ à une tierce personne hors de la famille. Ils agissaient ainsi pour la protéger et cela, Akemi n’en doutait pas. Seulement, elle s’estimait tout de même assez grande, maintenant, pour pouvoir prendre certaines initiatives qui la concernaient directement. Après tout, ce n’était pas comme si elle disait oui à une demande en mariage, n’est-ce pas ?

« Kazunari-kun… Je crois que tu te méprends sur l’ampleur de la chose. Ce qui te concerne directement n’est en réalité que le dixième de tout ce qui est arrivé dans ma vie, récemment. »

Prenant une inspiration, Akemi choisis de ne pas parler de sa maladie immédiatement. Elle voulait épargner ce genre de chose un maximum, pour le moment. Si jamais il venait à Takao l’envie de la questionner, et bien elle répondrait franchement mais pour l’heure, l’Aoki, si minuscule soit-elle, était bien déterminée à ne pas trop en dévoiler sur son état qu’elle avait si bien réussi à masquer jusque-là. On aurait presque pu l’applaudir.

« J’ai croisé le chemin d’une fille, après que je me sois…. Disons…. ‘enfui’ de Shutoku. Elle m’a tabassé et j’ai dû être transportée à l’hôpital ou je suis restée trois semaines. Voici pourquoi je t’ai laissé sans nouvelle jusque-là et je m’en excuse mais… je n’avais pas les moyens de contacter qui que ce soit. Là-dessus, mes frères et mes parents ont décidé de me changer d’établissement scolaire, au profit de Rakuzan, qu’ils estimaient plus…. ‘Sur’, pour moi. »

Et c’était vrai que les prédateurs tournaient moins autour de cet endroit. Oui, les véritables requins, à Rakuzan, il fallait les côtoyer de l’intérieur et devenir comme eux pour obtenir une place, même minime, au sein du complexe. Ce qu’Akemi essayait de faire à l’heure actuelle, en somme.