[+10 ans] I see you || Asuka ♥

Yukio n’avait jamais été une personne que les responsabilités étouffaient ou que le fait de voir beaucoup de choses reposées sur ses épaules tétanisait ; bien au contraire. Si c’avait été le cas, jamais il n’aurait pu supporter la charge du poste de capitaine de l’équipe masculine de basketball durant sa dernière année de lycée. Certes, aux yeux du monde ce n’était jamais qu’une « petite responsabilité extra-scolaire », mais pour lui et ses camarades de l’époque, c’était on ne peut plus sérieux. D’ailleurs, il s’était proposé pour devenir le nouveau coach de l’équipe actuelle de basketball masculin de Kaijo puisqu’à peine était-il arrivé ici – enfin revenu serait le terme plus exact – il avait entendu dire que le précédent coach se retirait à la fin du mois. C’était donc une occasion toute trouvé pour renouer un peu avec son passé et s’intégrer un peu mieux dans la communauté professorale qu’il allait devoir côtoyer pendant pas mal de temps maintenant.

Ce qu’il ne savait pas, en revanche, c’est que depuis le temps où il s’était absenté, le lycée Kaijou s’était maintenant couple à un collège, une école primaire et une maternelle. En soit, ce n’était pas une mauvaise chose, ainsi tout le monde était rassemblé au même endroit. Ceci dit, Yukio se demandait réellement si ça fonctionnait bien, ce système ? Sans doute puisque d’après ce qu’il en savait, aucun problème n’avait été recensé depuis la mise en place de ce réseau multiple. Tant mieux, ainsi il pourrait faire cours aux collégiens et lycéens sans avoir besoin d’aller prendre sa voiture pour changer de quartier. Un gain de temps pour tout le monde, en somme.

Tout en réfléchissant, Kasamatsu se fit un café en salle des professeurs du lycée, regardant par la fenêtre les étudiants qui arrivaient plus ou moins vivaces vers le bâtiment pour y suivre leurs premiers cours de la journée. Il ne put retenir un sourire en coin en repensant, tout seul, à ses propres années lycées. Elle n’avait pas été les plus simples mais restaient encore à l’heure d’aujourd’hui celles qui s’étaient faites les plus épanouissantes. Ses rêveries s’arrêtèrent là cependant alors qu’il réalisait qu’il devait aller consulter son propre emploi du temps. Comme il était arrivé ce matin pour entamer son office, il n’avait pas encore eut le temps de prendre connaissance de ses propres horaires – il se traita lui-même de stupide en le réalisant d’ailleurs.

Sortant de la salle commune avec son gobelet de café encore chaud en main, le brun ne fit pas attention et ne le remarqua qu’après avoir percuté une tierce personne, faisant gicler son café sur sa propre chemise, majoritairement.

« Ah ! Quel imbécile ! » fit-il, déjà agacé par ses propres écarts.

Cependant, il capta bien vite qu’il n’était alors pas seul au monde et que l’individu qu’il avait bousculé n’était autre qu’une jeune femme. Bon, il n’était certes plus aussi timide qu’il le fut autrefois avec la gente féminine – et heureusement pour lui et son développement personnel – mais il restait tout de même un peu fidèle à lui-même. Cependant, ça ne l’empêchait pas d’être courtois, tout de même. Aussi s’enquérait-il immédiatement de l’inconnue en face de lui.

« D-désolé ! Vous n’êtes pas blessée au moins ?! »

S’il commençait son travail en blessant une collègue – du moins il supposait que c’en était une -, ça n’allait pas le faire du tout.

On pouvait dire qu’il commençait sa prise de fonction de la pire des manières qui soit ! Sérieusement, renverser son café sur une collègue et manquer de la blesser en prime… Quel boulet, mais quel boulet ! Enfin bon, même en se fustigeant tout seul mentalement, Yukio savait bien qu’il n’arriverait à rien de cette façon ; que ce soit se faire des connaissances de travail ou tout simplement se mettre dans la peau du professeur de mathématiques qu’il était supposé être. Se pinçant l’arête du nez, le bellâtre se baissa pour ramasser la copie malmenée par le café d’une part et prendre un mouchoir dans sa poche de l’autre. Il essaya et le sol – grossièrement parlant mais c’était toujours ça de fait – et le morceau de feuille autant que faire se peut.

Se redressant par la suite, le sourcilleux tendit son ouvrage à sa vis-à-vis, l’air suffisamment traducteur pour qu’elle puisse deviner qu’il était embêté par la situation présente. Et puis cette heure qui continuait de tourner ! Comme s’il n’avait pas déjà suffisamment de circonstances contre lui en cette matinée bien pourrie ! Laissant un râle mécontent s’échapper de sa gorge, le Kasamatsu se rengorgea en comprenant qu’il ne pourrait pas tout gérer dans la seconde.

« Je… vraiment désolé pour vos copies, je trouverais un moyen de m’excuser convenablement un peu plus tard, si vous permettez. Que diriez-vous d’un café après la fin des cours, ce soir ? Je serais en salle des professeurs vers dix-sept heures, si jamais. »

Et il l’avait contourné pour partir à vitesse grand V vers la salle où il avait été affecté pour sa première heure de cours. Magnifique, des premières années. Ça allait être sympa de faire de l’autorité avec eux… argh. De nouveau il se mit à râler, comme le grincheux qu’il était et il ne du son semblant de sourire qu’a un petit message de sa fille avant de passer la porte. Himari avait décidemment ce pouvoir sur son père de le rendre aussi inoffensif qu’un agneau… ou presque ! Tout dépendait des circonstances et là il ne fallait pas déconner tout de même, il y avait une limite. Devant des étudiants il n’allait pas baisser autant sa garde non plus.

Cependant, il du bien reconnaître que finalement sa journée ne fut pas aussi affreuse qu’il avait pu l’imaginer de prime abord. Bon certes il avait dû faire jouer son autorité un peu pour faire taire des bavardages mais dans l’ensemble, ses premiers contacts ne furent pas dignes du Yamata No Oroshi des anciennes légendes. Ça va, pas encore de kraken ou de monstres dans ses classes – ce qui, en soit, était rassurant, tout de même.

Une fois son dernier cours fait, il quitta les murs de la salle et se dirigea vers la salle des professeurs ou chacun prenait ses effets personnels avant de quitter l’établissement. Lui n’ayant encore rien posé de concret, il ne faisait qu’arranger son petit bureau et attendre la jeune femme qu’il avait renversé tout à l’heure. Tiens d’ailleurs, ça lui faisait penser qu’il ne lui avait même pas demandé son nom…

Cette nouvelle première journée d'enseignante ne s'était pas réellement commencé comme elle l'aurait imaginée. C'est vrai que si elle avait eu un schéma bien précis en tête celui-ci n'avait pu que voler en éclat ne serait-ce qu'avec cette bousculade pour le moins imprévue. Elle avait visité l'établissement histoire de mieux se familiariser avec les lieux qui s'étaient averrés différent de ses souvenirs, avec l’extension de l'établissement au niveau primaire, c'était ce qu'elle avait prévu avant de penser rencontrer hypothétiquement l'un ou l'autre collègue. Elle n'y avait pas trop cru cela dit, c'était le premier jour pour tout le monde, la pression de ne pas être à la hauteur, le suspense du premier contact, mais surtout il fallait bien avouer qu'avant tout, c'était la course contre la montre ! De ce fait, elle pensait bien qu'il était peu probable qu'elle ait un premier contact quand bien même, quelque part, elle espérait le contraire.

Et bien, souhait exaucé ! C'était ainsi qu'elle s'était retrouvée face à cette personne qu'elle n'aurait pas cru revoir dans ces conditions. Le plus amusant était sans doute le fait qu'il ne l'ait pas reconnue au contraire de ses malheureuses copies qui avaient payé le prix de cette rencontre. Elle essayait de les récupérer et de replacer ses feuilles en une pile stable et rectiligne, c'était le but, avant de rester bloquée sur celles imbibées de ce liquide brunâtre recouvrant à présent le sol. Conclusion ? Elles étaient inutilisables ! Jamais elle ne se serait permise de les délivrer dans l'état où elles étaient actuellement. Le plus étonnant, restait sans nul doute le fait que le Kasamatsu, en plus de lui parler correctement, avait entrepris de nettoyer ses copies ce qui, bien entendu, s’avéra vain.

Après, s'il était embêté, c'était deja suffisant rien ce servait de trainer la situation en longueur après tout. D'ailleurs, comme elle l'avait pressenti, lui non plus ne dérogeait pas à la règle avec cette minutes qui ne cessait de filer, il n'avait pas plus de temps à lui accorder et ca se comprenait. Aujourd'hui, ils étaient tous dans le même bateau. Elle le remercia d'un sourire pour son aide avant de répondre à sa proposition.

« Ne vous en faite pas, ca ne doit pas être rare dans des jours comme ceux-ci, vous ne me devez rien je vous assure. Mais j'accepterai volontiers un café ! »

Elle le regarda ensuite s'en aller rapidement avant de se diriger vers la salle des profs afin de refaire une ou deux copies. Elle soupira. A vrai dire, elle non plus n'avait plus vraiment de temps à perdre et à bien y penser, c'était plus une tuile qu'autre chose cette histoire, elle pressa le pas. Au moins elle avait de la chance, à cette heure-ci il était peu probable qu'elle rencontre quelqu'un pour des copies de dernières minutes.

Chose faite, il n'était plus question de traîner c'est ainsi, qu'à son tour, elle se dirigea enfin vers le bâtiment dans lequel sa classe se trouvait. Cette année, c'était une classe de première qui l'attendait, sans doute une des plus dissipée. Il fallait tout leur apprendre, la lecture, l'écriture, toutes ces choses qu'Asuka trouvait amusantes et qui allaient faire partie de son lot quotidien. Elle était en route pour une nouvelle année bien remplie.

Bien que cette première journée avait pu lui sembler angoissante, finalement, elle avait été on ne peut plus enrichissante et en toute franchise, elle n'aurait pu espérer mieux. C'était le meilleur contact qu'elle avait eu jusqu'à maintenant et pour l'heure, elle en avait un bon sentiment. Il faudrait juste qu'elle apprenne à retenir tous leurs petits noms à présent et ce ne sera pas le plus difficile, maintenant qu'elle les avait noté et accompagné d'une photo d'eux. Haaa, une bonne chose de faite !

La journée se termina sans qu'elle ne s'en aperçoive, ce qui était pour le moins positif quand on savait que des élèves de six ans n'étaient pas toujours faciles. À présent, elle pouvait prendre son temps et s'étirer comme il se doit sur sa chaise une fois que le dernier enfant était parti. Il était temps pour elle de faire de même mais alors qu'elle s’apprêtait à partir, un dernier regard sur la pièce et sur les copies empilées lui rappela un détail. Décidément, ce café ne serait vraiment pas de trop ! Ainsi, fermant la porte, la Takao se rendit dans la salle commune où elle se surprit à voir que le senpai avait tenu parole. Elle sourit alors qu'elle pénétrait dans la pièce, saluant l'un ou l'autre de ses nouveaux collègues qui, eux, la quittait afin de rentrer chez eux. S'avançant d'avantage, elle s'installa à l'un des bureaux face à son rendez-vous du soir.

« Je ne vous ai pas fait attendre j'espère ? »

Pétillante, elle avait achevé sa phrase sur un petit sourire car après tout, le stress de la matinée une fois envolé, elle n'en restait pas moins une charmante demoiselle.