Il existe des périodes où l'on croit que le monde nous tombe sur la tête. Que tout va de travers, alors que tous n'étaient pas si noirs.
À cette époque, Akihito se demandait comment sa mère pouvait encore se bercer d'illusions sur le compte de son mari. Lui, le fils d'une grande célébrité du mannequinat, dont son nom n'avait plus besoin d'une explication. Les magazines déballaient successivement la dernière nouvelle le concernant : il jouait son premier rôle dans un film à l'eau de rose. Son « père », rien que cela ? En réalité, Akihito s'en fichait de cette nouvelle, comme de sa dernière paire de chaussettes. Il portait le même nom de famille bien qu'il eût demandé à sa mère de le changer à l'état-civil. Sa décision provoqua un conflit aux seins même de sa famille. Il ne supportait plus cette situation où l'on croyait encore aux contes de fées. Son père, quel qu'il soit, se fichait royalement de sa famille. Il représentait qu'un fantôme auquel Akihito désirait oublier. Le pire, c'est ce que soi-disant père sortait avec une femme différente toutes les semaines et cela se savait dans la presse.
Jusque-là, Yumi, sa meilleure amie, ne savait pas ce qui lui arrivait. Il évitait ce sujet avec elle, comme avec les autres. Personne n'avait été au courant de cette histoire. Et s'il devait en parler, il lui en parlerait en premier. En attendant, ses bouches demeuraient à sceller.
Le sourire perceptuel de ses lèvres devint un visage fermé. Il se concentrait aux études et écoutait la leçon fourni par le professeur. C'était l'une des deux choses qui le maintenait encore pied dans ce monde. Autrement, il aurait mal tourné dans la société à force de déprimer.
La sonnerie retentit et réveilla sa blessure. Il devra retourner dans cette atmosphère insupportable.
Il pensait traîner un peu en ville afin d'oublier sa situation. Yumi se dirigea vers lui, avec son immense sourire. Elle attendait la fin des cours pour réaliser leur rituel habituel. Un large sourire amical s'échappa des lèvres du garçon, mais il demeura faux. Triste.
Il me leva après avoir rangé mes affaires.
« Oui, allons-y. »
L'une de ses mains passa par-dessus son épaule, le cartable heurtant son dos. L'autre main poussa doucement la petite demoiselle pour la faire avancer. Passé au couloir, il se plaça à ses côtés, marchant au même rythme. Il pourrait prendre les devants, la faire trottiner par pur plaisir, mais il ne le faisait pas.
Il adorait rendre Yumi précieuse comme une princesse. Il la considérait comme la personne la plus importante de sa vie. Bien évidemment, elle ne connaissait pas le fond de ses pensées, ni même se sentir menacer par un prétendant. Yumi n'était pas intéressée par la gent masculine, ni créer sa propre histoire amour. Et lui, il avait déjà mûri mentalement. Il n'avait pas besoin d'un dessin pour expliquer son état d'âme lié à la puberté. Et le pire, c'est qu'il la désirait, en tant que petite amie.
Étouffant ses désirs enfuit aux plus profonds de lui, il te tenait droit alors qu'il retira ses chaussures de son casier. Il les lâcha et retira ses chaussons. D'un mouvement expert, il parvient à glisser ses pieds dans ses chaussures. La raison à cette façon de se chausser . Parce que Yumi s'appuyait à lui. Il acceptait si facilement ce contact sans le moindre dérangement. Il se baissa uniquement quand elle avait fini, rentrant la paire inutilisée.
Il la regarda, avec un sourire à ses mots. La savoir heureuse l'apaisé. Évité de la mettre dans cette histoire avait été la meilleure décision qu'il avait prise. Même si au final, il désirait qu'elle l'épaule sur cette histoire. Or, il était un homme, au goût mignon, et il devait se comporter en tant que telle.
« Tu es toujours d'humeur, Yu-Chan. Et franchement, tu es bien avec ton sourire actuel. Tu es si mignonne. »
Il passa sa paume dans sa direction afin de la taquiner en la poussant légèrement. Rapidement, elle agrippa à son bras, attirant le regard de leur entourage. « Le couple platonique », c'était le surnom de ses deux amis. Leur camarade de classe se demandait quand est-ce qu'ils passeraient le cap d'amitié à amour.
Akihito en avait conscience et ne faisait rien pour changer la donne. Il aimait ce lien qui les unissait et le détruire pour une simple amourette lui aurait été un véritable déchirement. Et dans l'état actuel de sa stabilité mentale, il ne le supporterait pas.
Le brun marcha à ses côtés, bras dessus-dessous. Il sortit de son sac ses écouteurs afin de les placer à la base du cou. Il ne comptait pas écouter la musique, puisque Yumi se trouvait à ses côtés, mais c'était son côté décoration.
Instinctivement, ils se dirigèrent vers le combini du quartier, à la quête d'une glace. Il en prendra une volontiers, histoire de réhydrater cette gorge devenue sec par ce temps ensoleillé. C'était une autre de nos rituels si particuliers.
« Oui, pourquoi pas. Je te laisse choisir. »
Yumi connaissait ses goûts en matière de glace, sucrerie et autres douceurs. Il ne pouvait nier qu'ils aient presque les mêmes goûts en matière culinaire. Et cela devenait un jeu quand il fallait trouver les différences. Il chercha dans sa poche son porte-monnaie, alors que la petite blonde kidnappa leur quatre-heures.
Akihito chercha à la rattraper. Or, il était bien trop tard et la défaite lui devint amère. Il bouda presque, les bras croisés, histoire de la taquiner. Il prit le paquet qu'il ouvrit sans la regarder. Et croqua à pleines dents. Une vague de froid lui mordit la tête à devenir douloureuse. Il se sentit mal, intérieurement alors qu'il se maudissait de jouer les idiots devant elle. Il attendit quelques instants avant de lui répondre.
« La prochaine fois, c'est moi qui paye. Et je t'en payerais deux. Euh non... Trois ! »
Quand il disait cela, il devenait sérieux. D'une manière ou d'une autre, il réalisait toujours ses prédictions. Et personne, ni même Yumi, ne pouvait le détourner de cette décision.
Il présenta son bras pour qu'elle y plonge la sienne. Il la fit sortir du magasin pour réaliser la troisième étape de leur rituel. Cela prenait la forme d'un petit parc de quartier, composé d'un bac à sable, d'une balançoire et des bancs – dont la mairie devait penser à repeindre avec le temps. Ils s'installèrent sur les balançoires, inoccupés à cette heure. Il se plaça sur celui de gauche, laissant la proche à son amie. Il ne s'y installa pas dessus, mais se tient tout même sur la chaîne.
« C'est bientôt la fin du collègue, Yu-Chan. Ça te dirait, demain, qu'on sorte au centre-ville ? »